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13/2/16 Charles Gave
     
              Des réformes faciles à faire et qui ne
                              coûteraient rien !

Tout le monde connaît cette phrase merveilleuse de Lord Salisbury à la Reine Victoria qui lui demandait d’effectuer des réformes : « Réformer, votre Majesté, réformer ? Vous ne trouvez pas que les choses vont déjà assez mal comme ca ? ».

A l’évidence, nous sommes à nouveau en période électorale en France puisque tous les candidats sont en train d’écrire livre sur livre (tous plus insignifiants les uns que les autres) pour nous expliquer comment ils veulent réformer notre beau pays. Voilà qui me laisse un peu pantois dans la mesure où ils ont tous été à un moment ou à un autre au pouvoir et que le moins que l’on puisse dire c’est que les changements qu’ils ont cru devoir apporter ont toujours été désastreux. Nous nous trouvons donc à l’évidence devant de magnifiques cas d’amnésie rétrograde, maladie qui semble affecter particulièrement les hommes politiques Français.

Mais enfin l’espoir fait vivre, et je crois de mon devoir de citoyen de signaler des réformes qui devraient être faites, qui ne coûteraient rien à personne et qui pourraient changer bien des choses.

Ces reformes les voici :

Il serait de bon ton de rendre les fonctionnaires inéligibles. Je m’explique. Dans les trois plus vieilles démocraties du monde, Etats-Unis, Grande-Bretagne et Suisse, un fonctionnaire peut se présenter aux élections, mais dés qu’il fait acte de candidature il doit donner sa démission pour toujours de la fonction publique, pour ne jamais y revenir. Ce n’est pas le cas en France ou si un fonctionnaire se présente au suffrage, il se fait « mettre en disponibilité » par son administration pour y retourner après l’élection suivante s’il est battu, sa carrière ayant continué à avancer de façon imperturbable entre les deux… Ce qui veut dire que pour un fonctionnaire se présenter c’est « pile je gagne et face je ne perds pas »… et du coup, entre la moitié et les deux tiers des députés sont fonctionnaires, ce qui rend notre pays irréformable.

En effet, réformer la France c’est réformer son Etat, c’est-à-dire supprimer les avantages dont bénéficie dans notre pays la gens administrative, et personne ne peut demander à nos héros de se tirer une balle dans le pied. La seule façon de réformer l’Etat, c’est bien sûr de ne pas en charger une chambre majoritairement composée de fonctionnaires, et pour cela, il faut que les fonctionnaires soient à égalité de chances avec les autres citoyens au moment des élections, ce qui n’est absolument pas le cas aujourd’hui. Rendre les citoyens égaux devant l’élection serait une vraie révolution dans notre pays.

Dans cet esprit, il serait de bon ton de limiter à une seule le nombre des retraites payées par nos impôts et que touchent tous ces braves gens. M. Juppé, quand il prendra sa retraite (le plus tôt sera le mieux), touchera sa retraite d’inspecteur général des Finances, à laquelle s’ajoutera celle de député, de maire de Bordeaux, d’ancien Premier ministre, d’ancien ministre, de président du conseil régional et que sais-je encore, et toutes ces retraites seront payées par nos impôts. Il serait normal que lui et messieurs Ayrault, Fabius, Chirac, Giscard, Hollande etc. ne puissent toucher qu’une seule retraite. Par exemple, De Gaulle, quand il a quitté l’Elysée en 1969, n’a accepté que sa retraite de colonel et rien d’autre.

Mais il y a plus : ces braves gens ont fait passer des lois pour que leurs épouses touchent cent pour cent de ce qu’ils touchaient de leur vivant, dans l’hypothèse malheureuse où ils viendraient à trépasser. Et ces épouses sont parfois beaucoup plus jeunes qu’eux, ce qui veut dire que la charge d’une retraite d’un député ou d’un sénateur va peser sur le Trésor public pendant au moins trois décennies après leur disparition. Et pourtant, Mme de Gaulle, une fois veuve, ne touchait que 60 % de la retraite de colonel de son mari, comme toute veuve d’officier. Ce qui était bon pour De Gaulle devrait être suffisant pour eux, et voilà qui les amènerait sans aucun doute à ne plus monopoliser toutes les positions à leur profit exclusif et empêcherait le redoutable cumul des mandats. On verrait apparaître peut-être enfin, des nouvelles têtes…

Dans un esprit de justice fiscale, il me semblerait normal qu’en cas de retraites cumulatives payées par nos impôts, l’on calcule la valeur actualisée de toutes ces retraites et que nos élus, qui ne demandent sûrement que ça compte tenu de leur dévouement à la chose publique, payent l’impôt sur la fortune sur ces sommes actualisées.

Prenons l’exemple de notre cher président actuel. Je me suis laissé dire qu’à sa retraite, il allait toucher 450.000 euros par an compte tenu de tous les mandats électifs qu’il a exercés, somme à laquelle il faut ajouter bien sûr sa retraite de conseiller d’Etat. Un pauvre entrepreneur comme moi, qui n’a fait que suivre son intérêt personnel depuis toujours au lieu de consacrer sa vie à ses concitoyens comme notre président, pour toucher 450.000 euros par an garantis par l’Etat et indexés, devrait disposer d’un capital d’au moins 40 millions d’euros. Il serait donc bon que cet homme qui déteste les riches paye au moins 1,5 % par an sur ce capital « virtuel » certes, mais dont il touche la rente qui n’existe que grâce à nos impôts encore une fois. A mon avis, l’ISF serait supprimé dans l’année, et tous les pauvres exilés fiscaux pourraient enfin rentrer pour mourir au pays.

« La femme de César ne peut être soupçonnée », aurait dit le divin chauve. Etant d’une famille d’officiers, je peux assurer le lecteur que nul ne peut être officier s’il a un casier judiciaire. Et cette règle s’applique également à tous les gendarmes quel que soit leur grade, car bien sûr les gendarmes sont des militaires également, mais des militaires locaux, enracinés dans nos campagnes où un casier judiciaire fait encore désordre. De plus, à ma connaissance, nul ne peut être juge s’il a un casier judiciaire, ce qui me paraît bien normal. Le président de la République est de par sa fonction le chef des armées et le garant de l’indépendance de la justice, et il me semble que quelqu’un qui aurait un casier judiciaire ne devrait pas pouvoir être le chef des armées pas plus qu’il ne saurait être le chef de la magistrature.

Je comprends que l’on accepte à l’assemblée ou au gouvernement des repris de justice qui ont «purgé » leur peine, dans la mesure où une telle inclusion fait sans doute monter le niveau moyen de compétence et d’honnêteté de ces institutions. Mais il y a des limites qui doivent concerner le sommet de l’Etat. Un président arborant un casier judiciaire ? Pensez à l’embarras des juges qui l’ont condamné puisque leur carrière dépendra de celui qu’ils ont condamné, dès qu’il sera élu. Voilà qui limitera singulièrement les condamnations d’hommes politiques dans le futur. Quant aux gendarmes, pourquoi poursuivre un receleur, un voleur, un escroc si nous avons déjà ça à la tête de l’Etat ?

L’homme public doit être transparent, ne cesse-t-on de nous dire. Fort bien. Quand M. Cahuzac s’est fait attraper avec un compte en Suisse, au Luxembourg à moins que ce ne soit à Singapour, j’ai appris par un minuscule entrefilet en bas de page dans un journal qu’il s’était démis de ses fonctions au Grand-Orient. Honnêtement, je me contrefous de savoir qui est ou n’est pas membre de ces organisations en France ou ailleurs. En revanche, en tant que citoyen, j’ai le droit de savoir si M.Ayrault fait partie de la même organisation, ou M. Valls ou Mme Taubira ou M. Hollande, tant il est tout à fait évident que M.Cahuzac n’est tombé que parce que les autorités suisses ont décidé de le faire tomber. Ce n’est certes pas le zèle judiciaire des autorités françaises qui ont fait plonger ce Tartuffe, mais l’exaspération des autorités suisses devant ce personnage leur donnant sans arrêt des leçons de morale. Les Suisses ont décidé de se payer Cahuzac parce qu’ils voulaient qu’on leur foute la paix. Et c’est pour ça qu’il va être jugé.

La question que chacun peut légitimement se poser est donc simple. Ce manque de zèle que chacun a pu constater dans la sordide affaire Cahuzac est- il dû à l’incompétence de nos magistrats ou au fait que M. Cahuzac avait des amis qui pouvaient bloquer le dossier ? En tant que citoyen, j’aimerais bien le savoir. Tony Blair, le premier ministre travailliste, s’était rendu compte, lorsqu’il était arrivé au pouvoir, qu’il avait un problème de « réseaux » dans la police, la justice et l’administration. Il avait fait promptement passer une loi stipulant que tout le monde a le droit d’appartenir à toute organisation de son choix mais que tous les fonctionnaires d’autorité ainsi que toute personne qui passe des contrats avec l’Etat devaient déclarer leur appartenance à tous ces clubs ou associations. Faire passer une telle loi en France assainirait considérablement l’atmosphère, par exemple dans notre système politique, nos tribunaux, nos commissariats ou nos médias, et cela ne coûterait rien.

Le principe de base dans une démocratie, c’est bien entendu la tenue régulière et fréquente d’élections. Et ce principe n’est vrai que s’il y a liberté d’association et de candidature. Ce principe n’est en rien respecté dans le monde du travail où il existe un « monopole de la représentativité » introduit après la deuxième guerre mondiale par Maurice Thorez, ce grand démocrate, et ce monopole ne profite qu’à quelques syndicats. On ne peut s’empêcher d’être émerveillé par la notion même de « monopole de la représentativité». Il faudrait de toute urgence l’étendre à toutes les élections, ce qui permettrait enfin à M. Valls d’exclure toute candidature indésirable et lui permettrait peut être de sortir de l’état de transe colérique perpétuelle dans lequel le met la toute charmante Marion.

En fait, non seulement ces syndicats dit représentatifs ont le monopole dans les élections qui touchent au monde du travail, mais en plus ils sont les seules institutions dans notre République à recevoir des subventions étatiques sans jamais être auditées ne serait ce que par la Cour des comptes. Nul ne sait d’où vient leur argent, nul ne sait ce que les chefs de ces syndicats font avec, mais tout le monde comprend qu’il ne vient certainement pas des membres de ces syndicats.

Le scandale était tellement énorme qu’un député de l’UMP avait mené une commission d’enquête sur le sujet. Son rapport, pour la première fois dans l’histoire du parlement, a été interdit de publication (me suis-je laissé dire), et bien sûr par un gouvernement de droite, ce qui est proprement invraisemblable. Supprimer la notion même de syndicats représentatifs, voilà qui serait une belle réforme. Après tout, la seule chose qui donne un caractère représentatif à un élu, c’est que l’élection ait été libre. Nous en sommes loin, très loin.

Et enfin, la dernière des réformes qui ne coûterait rien et pourrait rapporter gros, ce serait de sortir l’Etat de tout ce qui a à voir avec l’information ou la culture. Supprimer toutes les subventions, supprimer toutes les chaînes d’information « nationales », supprimer les avantages fiscaux dont bénéficient les journalistes, supprimer le ministère de la culture, supprimer le service chargé, à Matignon, de filer des enveloppes à l’Humanité, à Libération, au Monde, à Ouest France, au Figaro etc. au nom de la soi-disant diversité de la presse, serait faire œuvre de salubrité publique.

La liberté de la presse est antinomique avec la subvention étatique. Des journalistes subventionnés sont des chiens à la niche, et c’est bien pour cela que ces subventions existent, pour les garder à la niche, avec un bon collier autour du cou. La liberté, c’est d’avoir un compte d’exploitation en excédent en ne prenant en compte que les revenus provenant des lecteurs et de la publicité. A ce titre, il n’y a en France qu’un seul journal libre, c’est le Canard enchaîné. Et cela se voit.

Je ne prétends pas faire de la politique, mais j’ai un métier dans lequel j’ai appris, tout au long de ma vie, à ma remettre perpétuellement en question, car telle est la vraie nature de l’homme. Si je peux donner des conseils financiers à mes lecteurs, je n’ai en revanche aucun conseil politique à leur donner. A chacun d’entre eux de se forger une opinion. Mais pour ce faire, ils devraient envoyer à tous ceux qui espèrent être élus la liste de ces sept réformes. Ceux qui répondraient qu’ils sont prêts à les mettre en œuvre dans les 100 premiers jours de leur mandat devraient à mon avis bénéficier d’un préjugé favorable.
Quant aux autres, ce sont au pire des menteurs et au mieux des jean-foutre à écarter avec la plus grande célérité de toute envie qu’on pourrait avoir de voter pour eux.

Charles Gave
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