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Le Figaro avoue son erreur

16/12/04 Claude Reichman
Après avoir bravement titré, le 3 novembre 2004, " Sécurité sociale : monopole confirmé", Le Figaro a été contraint six semaines plus tard de manger son chapeau. En effet dans son numéro daté des 11 et 12 décembre 2004, le quotidien indique, sous le titre " EDF ne paiera pas de soulte aux retraites complémentaires " que " les directions d'EDF et de GDF viennent d'adresser aux régimes complémentaires de retraite Arrco et Agirc une lettre annonçant leur décision de ne pas demander l'adossement de la totalité des retraites complémentaires de leurs salariés à ces régimes ". Le Figaro ajoute que  "les deux groupes privilégient donc l'adossement a minima" et qu'ils ont en outre  "demandé à choisir leur caisse Arrco-Agirc librement en auditionnant plusieurs d'entre elles : les groupes Malakoff et Pro-BTP qui avaient été pressentis ne seront donc pas forcément les élus ".

Le Figaro écrivait le 3 novembre 2004 que les directives européennes " ont mis en place un marché unique de l'assurance privée qui ne concerne pas les régimes de sécurité sociale obligatoires " et que " parce qu'ils sont obligatoires les régimes complémentaires de retraite Arrco-Agirc sont considérés en droit européen comme un prolongement de la Sécurité sociale, donc soumis au monopole ". Or voilà que, dans son numéro des 11 et 12 décembre 2004, Le Figaro doit avouer que les régimes Arrco et Agirc n'ont pas le moindre monopole puisque la première entreprise française, EDF, peut ne pas y adhérer et qu'en ce qui concerne la partie de l'assurance vieillesse complémentaire de ses salariés qu'EDF a librement accepté de confier aux régimes Arrco-Agirc, elle a décidé de mettre les caisses en concurrence.

Rappelons que les caisses comme le groupe Malakoff et Pro-BTP, qui figurent parmi les organismes pressentis, sont considérées comme des entreprises par le Conseil d'Etat (décision du 16 juin 2004) et par la jurisprudence européenne et que de ce fait la France, comme l'a confirmé la Commission européenne le 25 novembre 2003, doit " accepter que toute entreprise d'assurance autorisée dans son propre Etat membre puisse couvrir ce risque sur la base de la liberté d'établissement et de la liberté de prestation de services". Autrement dit les assureurs européens peuvent couvrir tous les risques sociaux en France.

La seule question qui soit désormais posée est la suivante : le gouvernement français peut-il encore prétendre que le monopole de la sécurité sociale est maintenu alors qu'une entreprise de l'importance d'EDF déclare ouvertement n'y être pas soumise ? Poser une telle question, c'est évidemment y répondre. Le mensonge d'Etat vient de se briser. Et Le Figaro ferait bien de s'interroger sur la pratique de certains de ses journalistes qui n'ont pas hésité à relayer les mensonges du gouvernement, au risque de nuire gravement à la réputation du journal. " La complexité même de la société dans laquelle nous vivons, sa dureté, nous obligent à placer la rigueur et l'expertise au centre de notre métier, à remettre en lumière nos fondamentaux, à mettre au-dessus de tout le respect des faits ", écrit le directeur du Monde, Jean-Marie Colombani, dans un article de son journal daté du 16 décembre 2004 où il fait acte de contrition pour les dérives qui valent au quotidien du soir les graves difficultés qu'il connaît. Une phrase que le nouveau directeur du Figaro, Nicolas Beytout, devrait méditer, s'il veut mener à bien la tâche que lui a confiée Serge Dassault.

Claude Reichman

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