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30/6/16  Claude Reichman
     
                                     Dégage !

La crise européenne n’a rien d’inattendu. L’Europe n’a pas tenu ses promesses et elle se montre incapable de retrouver le chemin de la croissance. Dans le même temps, elle laisse entrer sur son territoire des millions de migrants sans avoir la possibilité de les accueillir. Sans gouvernance, sans projet, l’Europe est devenu un bateau ivre.

Les peuples ont très bien compris la situation et expriment à chaque occasion leur défiance. Le départ de la Grande-Bretagne fait suite à plusieurs référendums dans d’autres pays, tous négatifs pour l’Europe, et dont celle-ci n’a jamais tenu le moindre compte, misant sur le prétendu caractère irréversible de la construction européenne, dont on découvre aujourd’hui la précarité.

Faut-il pour autant décréter la mort de l’Union européenne ? Ce serait une grave erreur. Face aux géants que sont les Etats-Unis et la Chine, les pays européens ne comptent qu’unis. Encore faut-il que leur union soit viable. Elle ne peut l’être que si son mode de gouvernance revient à ce qui était prévu à l’origine, c’est-à-dire à la subsidiarité, l’Europe ne traitant que les problèmes que les Etats ne peuvent traiter eux-mêmes.

Mais il y a un problème plus grave encore, qui est la véritable trahison de l’objectif poursuivi par les traités, et notamment celui de l’Acte unique de 1986, qui avait décrété la suppression des frontières intérieures de l’Europe au 1er janvier 1993 afin de parachever le marché intérieur, gage d’expansion économique et de prospérité grâce à la généralisation de la concurrence.

A cette fin, deux directives de 1992 supprimèrent tout monopole en matière de sécurité sociale, ce qui signifiait la fin de l’Etat providence. La Sécurité sociale ne pouvait continuer à peser sur l’économie des pays européens lancés dans la compétition internationale.

Les chefs d’Etat et de gouvernements qui prirent cette décision n’étaient nullement des ultralibéraux, mais souvent des socialistes convaincus que le véritable progrès social dépendait désormais de la capacité des pays européens à affronter la concurrence mondiale à laquelle les condamnait le développement du transport aérien et maritime de masse.

C’est la France qui a mis à bas ce grand projet en refusant d’abandonner le monopole de la sécurité sociale, alors qu’elle avait pourtant inscrit sa suppression dans ses lois en transposant sous notre pression les directives européennes de 1992. Trois présidents de la République successifs, MM Chirac, Sarkozy et Hollande, ont commis ce véritable crime contre l’intérêt de l’Europe, de la France et des Français.

De la résistance de la France à toute évolution, nos partenaires européens, à l’exception de l’Allemagne et des Pays-Bas, prirent prétexte pour refuser eux-mêmes tout recul de leur Etat providence, et quand la crise de 2008 éclata, l’Union ne fut capable de que colmatages financiers et économiques qui durent encore aujourd’hui, sans que quiconque soit en mesure de dire quand cette période de précarité prendra fin. Tant il est vrai qu’il vaut mieux affronter une maladie quand on est en bonne santé que quand on est déjà malade.

La solution de la crise européenne est finalement assez simple. Il faut redonner aux Etats et aux peuples la maîtrise de leur destin en bornant les prérogatives de l’Union, interrompre immédiatement le flux migratoire, qui risque de tout emporter, et donner aux 500 millions d’Européens la liberté de leur protection sociale en appliquant enfin les directives européennes qui sont ce que l’Europe a fait de mieux en 59 ans d’existence.

Encore faut-il des gouvernants capables de réaliser ces réformes. La France, à cet égard, a un rôle décisif à jouer. Si elle réussit à se doter, à l’occasion de l’élection présidentielle, d’un président digne d’elle, son rayonnement rejaillira sur l’ensemble du continent, comme y réussit le général de Gaulle à son retour en 1958.

Partout où je passe, à l’occasion des dizaines de réunions que je tiens dans toutes les régions de France sur l’indispensable liberté de la protection sociale, je ne vois que des citoyens écœurés par la classe dirigeante et aspirant à un grand coup de balai. L’heure en est venue. Souvenons-nous de ce cri qui est venu à bout de plusieurs dictatures : « Dégage ! ». A nous de le hurler à la face de tous ces misérables politiciens qui ont fait tant de mal à notre pays.

Dégage ! Dégage ! Dégage !

Claude Reichman


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