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24/2/12 Michael Tanner
             La course à l’Etat-providence menace
                                les Etats-Unis !

Tous les jours apportant de mauvaises nouvelles en provenance d'Europe, nombreux sont ceux qui commencent à se demander combien de temps encore notre État-providence pourra échapper au modèle européen qui est en faillite. La mauvaise nouvelle, c’est que ce moment est arrivé.

Cette année, pour la quatrième année consécutive, nous avons emprunté plus d’un trillion de dollars pour soutenir le gouvernement des Etats-Unis, et notre déficit budgétaire dépassera les 1,3 trillions de dollars, soit 8,7 % de notre P.I.B. Seuls deux pays européens, la Grèce et l'Irlande, ont des déficits budgétaires plus importants que le nôtre en pourcentage du P.I.B. Les choses ne sont que légèrement meilleures quand vous regardez la taille de notre dette nationale, qui dépasse aujourd'hui 15,3 trillions de dollars, soit 102 % du P.I.B. Juste quatre pays européens ont de plus grandes dettes nationales que la nôtre : la Grèce, l'Irlande, le Portugal et l'Italie. Cela signifie que le gouvernement américain est moins responsable au plan financier que des pays comme la France, la Belgique ou l’Espagne. (1)

Et aussi mauvaises que soient les choses en ce moment, nous sommes sur une trajectoire encore pire en ce qui concerne l'avenir. Si l'on inclut dans notre dette nationale officielle le passif non capitalisé des pensions de retraite et de Medicare, nous devons 72 trillions de dollars, et si l’on ajoute les projections de la réforme de l’assurance-maladie imposée par Obama, nous sommes plus proches d’un endettement réel de 137 trillions de dollars. Dans le meilleur des scenarii envisagés, cela représente un endettement de 480 % du P.I.B., mais avec une projection plus réaliste, nous avons une dette colossale de 911 % du P.I.B.

Pendant ce temps, en comptant à la fois la dette publique et le passif non capitalisé des retraites et des soins de santé, la nation la plus endettée en Europe est la Grèce avec un ratio d’endettement de 875 % du P.I.B. Il est vrai que les États-Unis doivent potentiellement plus d’argent que l’économie grecque qui a tout juste la taille de Boston. La France, qui est la deuxième nation la plus insolvable en Europe, a tout juste une dette de 549 % par rapport à son P.I.B. (2) Même dans le scénario le plus optimiste, nous devons donc plus d’argent que ces cas désespérés que sont l'Italie, le Portugal ou l'Espagne. Il faut le faire !

Jusqu'ici, nous avons pu éviter les conséquences fâcheuses de notre prodigalité, car la crise en Europe nous a paradoxalement installés dans le rôle sublime de refuge des capitaux en mal de placement. Comparé à l'euro, le dollar semble une monnaie plus sûre. Cela signifie que certains sont toujours prêts à nous prêter de l'argent à des taux ridiculement bas. Mais cela ne durera pas éternellement. En fait, sept pays européens dont l'Allemagne et la Suède ont une meilleure cote de crédit que les Etats-Unis.

Il se peut que nous trouvions un certain réconfort dans le fait que notre État-providence n'est pas encore aussi grand que celui des Européens. Mais le mot clé ici est "encore." Aujourd'hui, notre gouvernement fédéral dépense plus de 24 % du P.I.B. Ajoutez à cela les dépenses locales, et le gouvernement, à tous les niveaux, consomme plus de 43 % de tout ce qui est produit dans ce pays au cours d'une année. Aussi mauvais que cela puisse paraître, c'est encore moins qu’en Europe où la moyenne des dépenses du gouvernement à tous les niveaux est d’un peu plus de 50 % du P.I.B. Mais selon les projections de la commission des finances du Congrès, les dépenses publiques dans ce pays devraient dépasser 42 % du P.I.B. en 2050 et les dépenses du gouvernement à tous les niveaux dépasseront 59 % du P.I.B. Et pourtant la commission a le culot de prédire que les dépenses fédérales et locales vont diminuer dans l'avenir, ce qui semble hautement improbable.

Il est vrai que l’on peut regarder des pays comme la France et la Grèce, ou même le Danemark et la Suède, et réaliser que nous finirons par avoir de plus grands administrations que ces États-providence par excellence. Les Etats-Unis cesseront d'être les États-Unis que nous avons connus. Mais est-ce qu’une économie peut supporter un fardeau aussi écrasant d’impôts et de dettes pour entretenir de telles dépenses ? (3)

Compte tenu de ce désastre imminent, le président Obama vient de présenter un budget qui rejette explicitement l’austérité (4), évite toute réforme de l'assurance-maladie ou du système de retraite par répartition, et va ajouter quelques sept trillions de dollars à la dette nationale au cours des dix prochaines années.
Qu’en pensent les candidats républicains ? Ils sont occupés à débattre des avantages et des inconvénients du contrôle des naissances. Mais dans quel monde vivons-nous ? (5)

Michael Tanner

Notes du traducteur :

(1) José Pinera, l’ancien ministre chilien, m’avait dit que les Etats-Unis feraient faillite en 2017. Relisez l’article que je lui ai consacré sur mon site « droite-conservatrice » à la date du 16 mars 2010.

(2) Notre ratio officiel d’endettement par rapport au P.I.B. (80%) est donc sept fois inférieur à l’épouvantable réalité. Les retraites des fonctionnaires sont « assurées » benoîtement par l’emprunt public jusqu’au jour où les marchés financiers vont se réveiller en portant le rendement des obligations à un niveau insupportable de 20%. Il y aura beaucoup de suicides parmi les retraités tombés dans la misère la plus noire. Mais je parie qu’ils crieront leur colère contre les requins de la finance comme le font actuellement les Grecs. Le socialisme est une fabrique à crétins.

(3) Ce problème central n’est ni abordé par nos candidats ni même évoqué par nos journalistes serviles qui réclament encore plus d’impôts et de dépenses.

(4) Le modèle d’Obama est Sarkozy qui a passé le plus clair de son mandat à évacuer ce problème central jusqu’au jour où une agence de notation a dégradé la note de la France. La méthode Coué a finalement trouvé ses limites lors de la dernière année de son mandat. Mais cela n’empêche pas l’impétrant de briguer un autre mandat en se drapant des oripeaux de la rigueur contre son adversaire socialiste. Les électeurs français sont-ils des veaux à qui l’on peut tout faire gober ? Nous serons fixés le 6 mai prochain.

(5) Nous vivons dans le monde des néo-keynésiens, où le maintien de la demande est la seule variable importante de leur économie virtuelle, jusqu’au jour où les marchés phagocytés par la pensée unique se réveillent.



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