Un formidable sentiment d’injustice !

Après les bonnets rouges, les gilets jaunes. Dans les deux cas, il s’agit du transport routier. Que l’Etat taxe à tout va depuis des décennies. Alors pourquoi la révolte éclate-t-elle maintenant ?

On se condamne à n’y rien comprendre si l’on croit qu’une protestation populaire a une cause précise et limitée. C’est toujours une longue accumulation de griefs qui finit par la provoquer.

La France est mal gouvernée depuis quarante-quatre ans, c’est-à-dire depuis l’accession de Giscard à la présidence de la République. Quels qu’aient été les chefs de l’Etat successifs, notre pays a toujours été gouverné par sa haute administration. La caractéristique de ces fonctionnaires, c’est qu’ils sortent tous du même moule et pensent tous de la même manière.

Or c’est cette façon de penser qui connaît un échec retentissant avec l’enlisement de la France dans le déficit, la dette, la régression économique et le chômage.

Macron n’est qu’un technocrate comme les autres. Il n’a pas l’ombre d’une solution pour le pays, hormis l’habituel petit jeu des prélèvements et des taxes, que viennent corriger à la marge des subventions aux secteurs et aux personnes qui ne s’en sortent pas.
Mais voilà : le mal est devenu si profond que cette méthode ne marche plus.

Un homme d’Etat comprendrait aussitôt qu’il faut de très profondes réformes. L’horizon de Macron est borné par ce qu’il a appris et vu faire, c’est-à-dire la petite jonglerie des mesures techniques qui n’obtiennent aucun résultat, sinon de rendre encore plus invivables l’enfer administratif et le champ de ruines qu’est devenue la France.

Tout indique que nous venons d’entrer dans la phase finale du cycle français. Un demi-siècle d’erreurs jamais corrigées va être balayé par la colère du peuple. Les gilets jaunes vont-ils faire la révolution ? Peut-être. Mais si ce n’est pas eux, ce sera les suivants. L’avenir, à cet égard, est écrit !

Pendant les cinq dernières années j’ai fait plusieurs fois le tour de France, à raison d’une à deux réunions par semaine, à l’invitation des Français qui entreprennent. Devant des assistances toujours très nombreuses, j’ai expliqué que le système social était la cause presque unique du mal français (j’avais d’ailleurs, en 1995, publié un ouvrage sous ce titre), et que seule la liberté de la protection sociale, telle que l’avait décidée l’Europe, libérerait notre économie et permettrait le redressement national.

Ne croyant guère aux élections, qui ne servent plus dans notre pays qu’à maintenir éternellement la même caste au pouvoir, j’ai recommandé à mes auditeurs de se préparer à faire sécession sur le Mont Sacré, comme le peuple romain l’avait fait contre les patriciens qui dirigeaient l’Etat et le maltraitaient gravement. Ce grand mouvement fut couronné de succès puisque les plébéiens obtinrent des garanties qui ne leur furent jamais plus retirées.

Cette sécession est plus que jamais à l’ordre du jour. Elle peut prendre diverses formes. La plus efficace, car la plus marquante, serait un immense rassemblement sur le thème du rétablissement des droits naturels et imprescriptibles proclamés par la Déclaration des droits de l’homme (liberté, propriété, sûreté, résistance à l’oppression). Les Français sont prêts à cette nouvelle proclamation de leurs droits. Ils éprouvent un formidable sentiment d’injustice. Celle que des politiciens sans vergogne commettent en permanence à leur égard. Et la répression qui s’exerce chaque jour un peu plus sur les citoyens est devenue intolérable.

Bien entendu nous soutenons l’action du 17 novembre. Mais nous savons qu’il faudra aller plus loin, et notamment structurer la protestation autour de thèmes fédérateurs, tels que les droits de l’homme, qui sont la charte fondatrice de notre peuple.

« Il ya des peuples qui commencent. Il y a des peuples qui finissent », a dit Clemenceau. Françaises, Français, tous ensemble, soyons un peuple qui recommence !

Claude Reichman