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30/11/14 Bettina Seipp
            Les Français sont très remontés contre
                                les Allemands !


Il n’y a guère dans l’histoire de l’humanité de relation aussi tendue que celle qui existe actuellement entre les Allemands et les Français mais dans laquelle les débordements d’agacement ou d’ironie sont formellement interdits. S’il vous arrive d’être traité de «sale Boche» (1) lorsque vous êtes en vacances en France, réagissez subtilement.

Subtil vient du latin et signifie quelque chose comme délicat, sensible ou attentionné. Pour les Français, c’est une contradiction en soi lorsque les Allemands essaient d'articuler subtilement leur langue. L’allemand avec ses nombreuses consonnes dures est si désagréable à l’oreille d’un Français qu'il préfère l’écouter à distance. Si vous éprouvez le besoin d’utiliser les conseils prodigués ci-après, vous devrez faire preuve de plus de finesse que cela avec les Français.

Contez-leur d’abord l’histoire merveilleuse de sainte Radegonde

La France est fière de ses femmes et personne ne vous dira le contraire. Pour cela, ne tarissez pas d'éloge à l’adresse de la vertu et de la ferveur religieuse des femmes françaises (2), qui peuvent se vanter à bon droit de ce que le premier couvent fondé en Europe fut celui de l'abbaye de Sainte-Croix, à Poitiers, par la reine des Francs Radegonde en l’an 558. Mais aussitôt que vous évoquez avec eux le nom de cette sainte qui a été canonisée au neuvième siècle, vous verrez beaucoup de Français sourire car ils l’ont implorée pour obtenir de bonnes notes à l'école. Maintenant, demandez-leur de façon hypocrite si la prière a bien marché pour les bonnes notes. Et presque aussitôt la réponse fuse, laconique : « Ce n’est pas étonnant car Radegonde était aussi allemande !» (3)

Cette bisbille est marginale pour les Francs. Avec Charlemagne (Charles le Grand 747-814), qui est considéré avant tout comme français, tout est rentré dans l’ordre. Il en va autrement avec Radegonde qui n’avait aucun point commun avec les Francs. La jeune fille de treize ans fut déportée de sa Thuringe natale pour épouser contre sa volonté le roi Clotaire 1er (495-561) qui avait assassiné son père Berthaire (485-531), le dernier roi de Thuringe. Promise pour être la quatrième épouse du roi Clotaire après la mort de la reine Ingonde, Radegonde se vengea à sa façon en embrassant une vie de nonne et en fondant un couvent pour femmes à Poitiers où elle se retira pour le reste de ses jours.

Arrêtez de leur parler d’Angela Merkel !

Avec la Déesse, le légendaire modèle DS de la maison Citroën, a commencé en 1955 la fabuleuse histoire de l’automobile française de haut de gamme, mais qui s’est malheureusement terminée avec l'arrêt de la production de la Citroën C6, le 19 décembre 2012. Certes, Citroën conserve un véhicule de haut de gamme avec la DS5, mais celle-ci n’a pas le confort hydropneumatique de son aïeule. Aussi le pauvre François Hollande est brinquebalé dans la DS5, le nouveau carrosse de la république, qui a une suspension trop raide pour son corps enrobé.

Feignez la compassion à l’adresse du président français et évoquez avec les Français les «grands problèmes» de la chancelière allemande qui, pour des raisons d’équité entre les marques, doit sans cesse changer de limousine entre l’Audi A8, la Mercedes S 600 et la BMW 760.

Vantez la baguette et le béret basque !

Le béret basque et la baguette sous le bras constituent l’archétype du Français à travers le monde. Ne faites pas la bêtise de leur rappeler que le béret basque provient du Béarn, une région du sud-ouest de la France qui fit longtemps partie du royaume indépendant de Navarre, et que la baguette fut créée par un boulanger viennois qui s’installa à Paris en 1830.

Pour un Français, la baguette de pain blanc est sans égale et il n’apprécie pas qu’elle soit dénigrée. Coupez la baguette en deux, remplissez-la de crème fraîche, et commentez-la à votre tour avec les mots suivants : «Présenté comme un chou à la crème, votre baguette trop sèche passe mieux dans le gosier.»

Evitez de susciter la confusion des mots !

En Allemagne, il est souvent fait référence à la «Grande Nation», mais cette formulation respectueuse n’est pas comprise en France. Il faut dire «une très grande nation» pour honorer la France comme elle se doit.

Il existe de nombreux autres exemples de malentendus linguistiques entre les deux pays. Par exemple, évitez de poser une question embarrassante à vos interlocuteurs français, comme «Pourquoi la légendaire Légion étrangère mérite-t-elle de s’appeler ainsi alors que les mercenaires allemands ont atteint parfois 50 pour cent de ses effectifs ?»

Et dans le cas improbable où vous auriez commis cette énorme bourde, blâmez l’historien anglais Eckard Michels. Dans son livre «Les Allemands dans la Légion étrangère 1870-1965 : mythes et réalités», Michels ose soutenir, en référence aux archives françaises, qu’environ 100.000 Allemands auraient servi dans la Légion étrangère entre 1870 et 1962. Si l’on inclut l’Alsace et la Lorraine dans les ressortissants allemands entre 1870 et 1918, leur nombre passe à 125 000.

Ne pariez jamais Michel contre Marianne !

La France est fière de ses femmes et personne n’oserait la contredire. Louez la décision de la banque centrale française d’orner les pièces de monnaie d’un, deux et cinq centimes avec Marianne, la figure emblématique de la République française. Avec ces belles paroles, vous pouvez facilement passer à la crise de l'euro, un sujet pour lequel vous vous retrouvez maintenant dans le rôle du boxeur ukrainien Klitschko.

Round 1

Commencez par une citation du ministre français de l'économie, Michel Sapin, qui a dit lors d'une conférence à propos de la France : «Il y a un Etat, mais c’est un Etat qui est en complète faillite.» Si les Français sont d’accord avec cette déclaration du ministre, répondez : « C’est à peine croyable que cela ne se soit pas encore produit !»

Round 2

Corrigez-vous en disant : «Peut-être que la dette publique de la France n’est pas si grave que cela avec 94 % du PNB, car il y a encore beaucoup de marge de manœuvre vers le haut. Songez à la dette du Japon qui représente 243 % de son PNB !» (4)

Round 3

Faites une ouverture : « Mais je n’arrive pas à comprendre, alors que vous construisez de si belles voitures comme la Citroën DS5, pourquoi les exportations de votre pays ont perdu un tiers de leur part de marché depuis l’introduction de l’euro.»
Si vous avez une pièce d’un centime avec Marianne entre les doigts, vous pourriez à bon droit vous demander : «Si Michel (5) était à la place de Marianne, l’euro aurait une meilleure chance d’éviter de disparaître.»

Bettina Seipp

Notes du traducteur

(1) Le mot «boche » est une aphérèse de «alboche» qui serait formée de «al» pour allemand et «boche», une suffixation argotique de bosse ou tête de bois. Boche commence à se répandre dans l’argot militaire à partir de la guerre franco-allemande de 1870, sans être empreint d’animosité comme il le deviendra lors de la Grande Guerre. Boche fut un argot utilisé seulement par les soldats français et belges, alors que les soldats britanniques en inventèrent un autre pour désigner l’adversaire commun avec «Huns», en référence aux envahisseurs d’Asie centrale conduits par Attila. En effet, l’état-major de la Reichswehr pratiqua la tactique de la terre brûlée en février 1917. Il s’agissait d’économiser 13 divisions et de les mettre en réserve en réduisant la longue ligne de front allant de la mer du Nord aux Vosges. Le repli sur la ligne Hindenburg fut établi par les généraux Paul von Hindenburg et Erich Ludendorff. Il fut précédé d’une destruction totale de la zone libérée d’une trentaine de kilomètres de profondeur dans l’Aisne.

(2) A propos des veilleuses de nuit qui campent tous les jeudis soirs devant les préfectures et sous-préfectures de France et de Navarre en priant pour l’abrogation de la loi blasphématoire sur le mariage des gays et des lesbiennes et l’adoption d’enfants par ces couples homosexuels, voici ce qu’écrit Valérie Trierweiler dans son livre « Merci pour ce moment » : « Le débat sur le mariage pour tous alimente la fachosphère. Sur internet, l’extrême-droite est remontée à bloc, je me fais insulter à longueur de temps.» Les veilleuses de nuit seraient des fascistes aux yeux de la camarade socialiste et ex-concubine du président. Le fascisme est souvent utilisé à tort et à travers par la gauche bien-pensante pour dénoncer ses adversaires, alors que c’est elle qui s’est comportée en fasciste en imposant une loi contraire à l’ordre naturel qui fait cruellement défaut dans notre nation. Cet ordre naturel est par essence supérieur à toute construction juridique. Pourvu que les militants se le rappellent alors que se déroule le vote du nouveau président du parti de l’eau tiède.

(3) Radegonde, ou Radegund en allemand, était la fille de Berthacar ou Berthaire en français, le roi de Thuringe.

(4) C’est cette comparaison avec la dette abyssale du Japon à laquelle songent nos indécrottables keynésiens pour creuser davantage le trou avec la complicité de Juncker, le nouveau président de la Commission européenne, qui a donné son aval à un plan de 300 milliards d’euros, pour faire plaisir à Hollande, avec qui il est cul et chemise, et au grand dam d’Angela à qui il doit pourtant son poste. L’ingratitude est la marque des minables et des parvenus. Si Hollande va entrer dans l’histoire comme le fossoyeur de la France, Juncker sera celui de l’Union européenne.

(5) Michel, ou pour être précis Sankt Michaeliskirche (l’église de Saint Michael à Hambourg), orne la pièce de deux euros introduite en 2008 en Allemagne.
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