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24/10/18 Claude Reichman
     
Quand on frappe à votre porte à six heures du matin

« La différence entre dictature et démocratie ? En démocratie, lorsqu’on frappe à votre porte à six heures du matin, c’est le laitier. » La phase est de Winston Churchill, qui savait ce que c’est de combattre une dictature.

Les perquisitions policières menées contre M. Mélenchon et son parti n’ont fait du bruit que parce que M. Mélenchon a hurlé et s’est défendu. Bien entendu, le chœur de la vertu a condamné l’attitude du président de la France insoumise pour ne pas s’être soumis en silence (et pourquoi pas en disant merci) à la violation de son domicile.

Disons-le clairement : ce n’est pas parce que l’envahissement de votre demeure par des policiers armés et revêtus de gilets pare-balles a été décidé par un procureur qu’il n’en est pas moins une violation de domicile. D’autant que les procureurs ne sont nullement des juges indépendants, puisqu’ils obéissent aux ordres de leur hiérarchie. Ils ne sont pas même des magistrats, considère la Cour européenne des droits de l’homme.

De nombreux partis politiques français ont subi un tel sort, sans que cela ne suscite la moindre émotion des médias et du public. C’est que l’opinion n’a pas compris ce qui se jouait. Il a fallu que M. Mélenchon crie au scandale pour qu’enfin l’Assemblée nationale fasse entendre quelques applaudissements de soutien.

Bien entendu, je n’ai pas la moindre sympathie pour les idées de M. Mélenchon, qui n’est finalement que l’héritier attardé des enragés de la Terreur révolutionnaire. Mais ce n’est pas une raison pour accepter qu’on le traite comme un truand en cavale. On a vu récemment les policiers s’emparer nuitamment du gangster évadé Redoine Faïd. Mélenchon a finalement subi un sort à peine différent, si ce n’est qu’on ne l’a pas vu assis sur son lit et menotté, l’air hagard.

Ce qui se passe en France est d’une extrême gravité. Notre pays est en train de devenir un Etat policier, une véritable dictature, des mains de la justice. Or la justice, qu’est-ce que c’est ? 9 000 juges qui en fait n’obéissent qu’à eux-mêmes, même s’ils font semblant d’obéir au pouvoir politique.

L’objectif des juges est de régner sur la société française. Ils sont ivres d’un pouvoir que plus personne ne leur conteste, alors même que leur comportement est purement et simplement factieux. Un haut magistrat m’a dit un jour : « Il ne faut surtout pas donner plus de pouvoir aux juges. Ils n’en ont déjà que trop ! » Il voyait bien se profiler la dictature des juges.

Ce n’est pas un hasard si les juges s’en prennent aux hommes politiques. Ils savent que ce sont les seuls (avec le peuple, mais celui-ci ne se met en mouvement que très lentement) à pouvoir les obliger à rentrer dans le rang. Il faut dire qu’ils ont senti le vent du boulet. Le scandale judiciaire d’Outreau a suscité la création d’une commission d’enquête parlementaire qui a fait un excellent travail … et dont les conclusions ont évidemment été enterrées. On est passé à côté de la grande réforme de la justice dont notre pays a un impérieux besoin s’il veut rester une démocratie.

Affirmons-le avec force : un élu de la République n’est pas un malfaiteur (même si certains, au demeurant fort peu nombreux, se conduisent mal). Et Jean-Luc Mélenchon a eu raison de dire qu’un élu est sacré, car depuis le sacre de Clovis le pouvoir politique, qu’il soit monarchique ou républicain, a toujours été revêtu de cette onction, sans laquelle aucun dirigeant ne peut accomplir son devoir.

En s’attaquant aux élus de la République, les juges accomplissent un coup d’Etat. Personne ne dit que les élus sont au-dessus des lois. Mais ils ne peuvent être des justiciables ordinaires, car si tel devait être durablement le cas, l’issue d’une telle folie ne pourrait être que la guerre civile, chacun s’armant pour faire respecter ce qu’il estime être son droit sans qu’une assemblée élue ne vienne accommoder les uns et les autres et, finalement, faire régner la paix civile.

Alors oui, M. Mélenchon a eu raison de se rebeller. Et ceux qui, hors de son camp, l’ont applaudi à l’Assemblée nationale, ont eu raison aussi. En permettant –s’il ne l’a suscité – ce comportement des juges, le Président de la République, gardien des institutions, a manqué à son devoir. Le peuple le sait. Le peuple n’attend plus que le moment d’agir.

Claude Reichman


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