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Les juges doivent payer pour leurs fautes

26/6/05 Claude Reichman
J'ai publié cet article le 26 mai 2005. Je n'ai pas un mot à y changer. Mais quelques-uns à y ajouter. Nicolas Sarkozy est devenu, depuis, président de la République. Il n'a toujours pas décidé d'appliquer loyalement les lois qui suppriment le monopole de la sécurité sociale. Ni sanctionné les magistrats qui les violent. Mais l'histoire est en marche et, pour lui comme pour eux, l'heure de vérité est proche.

Claude Reichman
21 juin 2008.

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" Le juge doit payer pour sa faute ".
Cette déclaration de Nicolas Sarkozy n'aurait pas dû soulever la moindre émotion, puisqu'elle n'est que l'expression du principe républicain de base qui veut que tout citoyen soit responsable de ses actes, et donc éventuellement coupable. Mais voilà : en France, les magistrats sont irresponsables dans l'exercice de leurs fonctions. Car ce ne sont évidemment pas les actes privés des juges qui font problème. Ils sont sanctionnables normalement, encore que traités le plus souvent avec une infinie compréhension par leurs collègues et n'entraînant administrativement que peu de conséquences sur leur carrière. Mais nous sommes là dans le pur et simple corporatisme, dont la France, en beaucoup de domaines, s'est fait une spécialité et il n'y pas lieu de s'en indigner pour les magistrats plus que pour les autres, si ce n'est que quand on juge autrui on se doit d'être exemplaire.

L'irresponsabilité professionnelle des juges est en revanche un problème très grave que nous avons, avec d'autres, soulevé depuis longtemps. Le criminologue Xavier Raufer est l'auteur d'une formule particulièrement éclairante : " Les malfaiteurs ne s'arrêtent que quand on les arrête. " Il en est de même de toute personne au comportement régulièrement fautif. Et cela vaut donc aussi, individuellement certes mais surtout collectivement pour les juges. La corporation des magistrats a pris la détestable habitude de se soumettre aux désirs de l'Etat, qu'elle fait passer avant toute considération contraire, telle qu'au premier chef l'application des lois de la République. Rien d'étonnant à cela : les magistrats ne sont que des fonctionnaires, dépendant de l'Etat pour leur avancement et ne disposant d'aucune légitimité personnelle. Le respect qui leur est porté n'est fait que de crainte. Les Français n'aiment pas leurs juges parce qu'ils ne leur portent aucune considération particulière, et notamment pas celle qu'on éprouve pour ceux que distinguent leurs qualités personnelles. Si l'on veut qu'il en soit autrement, la seule mesure crédible consiste à élire les juges.

Nous demandons à l'Etat de faire un exemple

Mais si l'on recule devant cette mesure qu'un pays vraiment démocratique comme les Etats-Unis a adoptée, on peut dans un premier temps changer radicalement le mode de recrutement des magistrats, en supprimant l'Ecole nationale de la magistrature, qui nous fournit des juges aussi coupés des réalités que le sont les produits de l'Ecole nationale d'administration, et en n'acceptant comme magistrats que des personnes pourvues évidemment des diplômes universitaires requis et d'une expérience professionnelle civile d'au moins dix ans. Quand aux juges en place, ils seraient tous remis en cause, comme Ronald Reagan l'avait fait pour les contrôleurs de la navigation aérienne défaillants, et soumis à des épreuves qualifiantes par des jurys de personnes ayant fait leurs preuves dans tous les domaines de la vie économique et sociale du pays - ceux dont précisément les magistrats ont à connaître - avant d'être admis à nouveau dans les rangs de ce corps.

A défaut de l'élection des juges, qui est le meilleur moyen de sanctionner les comportements fautifs, il faut à ces derniers appliquer des sanctions crédibles si l'on veut rétablir la confiance des Français dans leur justice. Et il y a des solutions. Elles dépendent des citoyens tout comme des hommes politiques. Ecoutons ce que dit le plus haut magistrat de France, M. Guy Canivet, premier président de la Cour de cassation, dans une interview publiée par Le Monde le 22 avril dernier : " Les citoyens ne sont pas dépourvus d'outils de contrôle, avec la récusation et la mise en cause de la responsabilité du service public de la justice. Il serait intéressant de savoir pourquoi n'est jamais utilisée l'action récursoire dont dispose le ministre de la justice contre le magistrat qui, par sa faute personnelle, a engagé la responsabilité de l'Etat. " A ceux qui ne sont pas juristes précisons que l'adjectif récursoire qualifie une action par laquelle une personne contre laquelle est introduite une instance y fait intervenir un tiers pour qu'il réponde des condamnations qui pourront être prononcées contre elle. Dans le cas des magistrats, qui ne peuvent être poursuivis en tant que tels en raison de leurs décisions, puisque seul l'Etat peut être mis en cause, ce dernier peut se retourner par l'action récursoire contre le magistrat fautif et l'en rendre responsable personnellement. Par ce moyen, le juge peut être appelé à payer - à tous les sens du terme - pour ses fautes.

Nous avons un excellent exemple à proposer et nous demandons précisément à l'Etat de faire un exemple. Dans l'affaire du monopole de la sécurité sociale, les juges français, à quelques rares exceptions près, pour obéir au pouvoir politique, bafouent depuis plus de dix ans les lois de la République et même les traités internationaux signés par la France. Tous ceux dont les entreprises ont fait faillite par la faute de jugements volontairement erronés, tous ceux qui ont été condamnés de ce fait au chômage et à la misère, ne vont pas manquer de demander réparation à l'Etat, et celui-ci devra à son tour rendre responsables, sur leur rémunération et sur leurs biens propres, les magistrats coupables de ces jugements scandaleux. Qu'on ne s'y trompe pas. La France est entrée dans une crise révolutionnaire et les magistrats n'en sortiront pas indemnes. Ils en seront même, avec les politiciens, les premières victimes. Tant il est vrai que le peuple sait toujours fort bien qui lui a fait du tort.

Claude Reichman
Président du Mouvement pour la liberté de la protection sociale (MLPS).




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