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16/2/12 Charles Gave
             Comment réduire le poids de l’Etat ?

Certains lecteurs se souviennent peut être, pendant le procès de l’affaire Dreyfus, des interventions du Président Delegorgue, particulièrement attaché à ce qu’aucune question embarrassante ne soit posée aux responsables militaires. Chaque fois que l’un des témoins ou des enquêteurs se rapprochait un peu de la vérité, le président intervenait pour indiquer que « la question ne sera pas posée » .

Nous en sommes là, à nouveau. La seule question qui devrait être posée est celle du poids et des missions de l’Etat dans la France d’aujourd’hui. Ce devrait être le seul et unique sujet du débat entre politiques et citoyens. Et pourtant, la classe politique dans son ensemble a décidé d’essayer d’arriver à l’élection présidentielle en parlant de tout, mais surtout pas de la seule chose importante, le poids du secteur non concurrentiel dans notre économie.

Bien au contraire, d’après beaucoup de bons esprits, le problème de l’économie française serait en fait qu’elle aurait souffert depuis bien longtemps d’un excès de libéralisme, qu’il est urgent de corriger toutes affaires cessantes. Dans ce diagnostic, on retrouve l’extrême gauche, l’extrême droite et une grande majorité de ce qu’il est convenu d’appeler la gauche de gouvernement. La droite classique quant à elle se garde bien de s’engager dans le débat miné du rôle et du poids de l’Etat dans notre économie et se borne à essayer de convaincre les électeurs qu’elle sera plus compétente que la gauche à gérer le Léviathan, tandis que quelques rares candidats se concentrent non pas sur la cause première de tous nos déboires, la taille de l’Etat et du secteur étatique « hors marché » dans notre économie, mais sur leurs conséquences, le déficit budgétaire et la taille de la dette, sujets qui fâchent beaucoup moins. Apres tout, qui peut être contre le retour à l’équilibre budgétaire ?

Dans mon livre « L’Etat est mort, vive l’Etat », j’ai indiqué que depuis que nous sommes passés de l’ombre à la lumière en 1981, le poste « santé, éducation, sécurité sociale » a vu sa « valeur ajoutée », telle que définie par l’INSEE, passer d’une base 100 à prés de 500 aujourd’hui, pendant que le poste « administration » quant à lui quadruplait.

En bas de l’échelle, on trouve l’industrie et les biens de consommation qui ont à peine doublé…et qui stagnent misérablement depuis plus de 10 ans…

Pour en revenir à un thème qui m’est cher, depuis 1981 le secteur public a connu un taux de croissance annuel supérieur de 2% à celui du secteur privé, ce qui au bout de 30 ans finit par faire de notre pays la nouvelle Union soviétique. Et comme le PNB incorpore la croissance des dépenses étatiques à leur coût et que ce coût est financé par la dette, les Français ont l’impression qu’ils s’enrichissent, ce qui était exactement l’impression qu’avaient les Grecs il y a trois ans. Mais, comme les Grecs, ils confondent capacité à emprunter et création de richesse. Le réveil sera dur…

Dans ces conditions, parler d’une crise créée par les excès d’un libéralisme débridé, c’est vraiment se foutre du monde, quant on sait que les dépenses sous le contrôle direct de l’Etat français représentent aujourd’hui plus de 55 % du PNB de notre pays…

• La France crève du poids de son Etat, telle est la réalité.

• Comment réformer un Etat quand plus de 50% de la population en touche des prébendes, telle est la vraie question.

Mais que le lecteur se rassure, la seule, la vraie question, à savoir « Comment traiter cette hypertrophie en s’appuyant notamment sur les exemples suédois ou canadien », « ne sera pas posée ».

La classe politique y veille.

Charles Gave


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