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9/6/15 Charles Gave
     
          Il y a de moins en moins d’argent à voler,
                    le socialisme touche à sa fin !

Dans Le Figaro Magazine du 29 mai 2015, j’ai trouvé le prix des terres agricoles par hectare labourable en Europe en 2012.

Les voici.

Pays Bas : 49 300 E.
Irlande 23 800 E.
Angleterre 20 500 E.
Italie 20 000 E
Allemagne 19 800 E
Danemark 17 800 E
Espagne 9 700 E.
Suède 6 500 E.
France 5 500 E.
Pologne 5 000 E
Roumanie 4 000 E.
Et pour mémoire USA 6 900 E, Canada et Brésil 3 000 E et Australie 1 000 E …

La terre française parmi les moins chères en Europe !

Sully doit se retourner dans sa tombe…

Comment est ce possible ?

La terre représente un bien en capital comme un autre. Il n’y a aucune raison de penser que la productivité de la terre danoise soit supérieure à celle de la terre française. Un hectare de terre reste un hectare de terre. De plus, les paysans de tous ces pays opèrent dans une zone commune, régie par la fameuse politique agricole commune ou PAC, et l’on peut penser qu’ils disposent tous d’un bagage technique similaire. La valeur de l’hectare labourable devrait donc être à peu prés la même partout en Europe, or il n’en est rien, à l’évidence.

Comment donc expliquer les différences de valorisations d’un pays à l’autre ?

Pour comprendre les raisons (probables) de ces écarts étonnants, il me faut faire un peu, un tout petit peu, de théorie financière.

La valeur de tout actif est égale à la somme escomptée des revenus futurs que le propriétaire va en tirer après impôts, auquel il faut ajouter la valeur de la revente à la fin de la période. Il est donc très probable que la rentabilité immédiate (cash flow dégagé/ capital investi) de l’agriculture française soit très inférieure à la rentabilité de l’agriculture dans les autres pays… Si cela n’était pas le cas, les agriculteurs hollandais par exemple vendraient leurs terres pour en acheter quatre fois plus en France. Il est donc probable que la rentabilité de l’agriculture hollandaise soit au moins quatre fois supérieure à celle de l’agriculture française, ce qui est pour le moins surprenant.

De plus, contrairement aux autres biens en capital, la terre n’a pas besoin d’être amortie. Il est donc tout aussi probable que la facilité avec laquelle le propriétaire pourra vendre sa propriété aura un impact important sur la valeur finale de la terre. On peut donc légitimement penser que la transmission du capital au plus offrant souffre énormément dans notre beau pays, le but essentiel étant sans doute d’empêcher le « riche » d’accroitre son domaine (voir les Safer etc.) au détriment du « pauvre ». On donne donc plus de facilités au mauvais serviteur qu’au bon, ce qui n’est pas vraiment conforme à la parabole des talents. Ces freins à la transmission libre de la propriété font bien sûr baisser la valeur de la terre pour tous ceux qui voudraient vendre, ce qui appauvrit considérablement le «pauvre paysan» cher à Fernand Raynaud et n’enrichit personne.

Enfin l’agriculture reste une activité saisonnière, ce qui suppose que les propriétaires bénéficient d’un statut du travail saisonnier qui ne soit pas trop contraignant. Ayant eu des cultivateurs dans ma famille, je peux garantir que les trente cinq heures étaient et restent une idée qui apparaît aussi farfelue au paysan qu’au docteur de base à l’hôpital ; connaissant notre pays, on peut craindre le pire dans ce domaine.

Enfin, je me suis laissé dire que dans certains départements, le nombre d’employés du ministère de l’agriculture est supérieur au nombre de paysans, et comme en fin de parcours la seule utilité du fonctionnaire de l’agriculture est de vérifier que les réglementations sont respectées, on peut penser que nos braves agriculteurs souffrent des mêmes maux que nos pauvres industriels. Et comme ces réglementations, dans le fond, ne sont souvent qu’une forme de nationalisation larvée, il arrive sans doute à notre agriculture ce qui est arrivé à notre Education nationale ou à notre industrie, les mêmes causes produisant les mêmes effets.

Après tout, chacun sait que la marge brute d’autofinancement des entreprises françaises est de 60 % inférieure à la même marge pour une entreprise allemande ou britannique. Et donc une entreprise française produisant en France se vend à 25 % ou 50 % du prix qu’atteint une entreprise similaire en Allemagne ou en Angleterre, ce qui est bien normal puisqu’elle est grevée de taxes, d’impôts et de réglementations plus stupides les unes que les autres. Pourquoi n’en serait-il pas de même pour l’agriculture ?

De tous les pays du monde, la France est sans doute celui qui a le plus grand potentiel à créer de la valeur dans le domaine agricole. Pas plus que dans l’industrie ou le commerce, on ne peut rendre les travailleurs français responsables des désastres sans fin créés par mes Oints du Seigneur car ils en sont les premières victimes. De fait, je n’ai pas et je n’ai jamais eu le moindre doute sur la capacité des travailleurs français à être productifs. Il suffit de se balader dans nos campagnes et dans nos villes pour voir que le Français, depuis la nuit des temps, créait presque naturellement de la beauté et de la richesse.

Et puis un groupe mortifère s’est emparé du pouvoir, dont le mot d’ordre était «on s’en fout de réussir, pourvu que les autres échouent», je veux parler bien sûr des « Oints du Seigneur » et non pas seulement des socialistes.

Et pour ce qui est d’empêcher les autres, c’est-à-dire ceux qui ont du talent, de réussir, on ne peut que constater leur immense succès.

Pour la première fois depuis vingt siècles, la France n’a plus aucun grand intellectuel, et ce désastre date bien sûr de l’invention du ministère de la Culture par de Gaulle et Malraux. Supprimer le ministère de l’inculture devrait être la première tache de tout responsable politique nouvellement élu.

Les grandes entreprises françaises qui restent compétitives sont rachetées les unes après les autres par leurs concurrents étrangers : Peugeot, Alstom, Lafarge, Club Med, Norbert Dentressangle… Ces noms célèbres sont apparus dans les tous derniers mois, et la liste de ceux qui les précèdent est longue. Le grand capitaliste n’en peut plus et vend.
Les petites entreprises françaises, que personne ne veut racheter, pendant ce temps ferment par milliers, et de précieux savoir faire sont perdus à tout jamais.

Soixante à quatre-vingt pour cent des diplômés de nos meilleures écoles ou universités quittent la France pour travailler souvent dans des entreprises non françaises, voire pour créer leur entreprise à l’étranger. Bon nombre d’entre eux ne reviendront jamais, et Londres est maintenant la quatrième ville française.

Ce que Louis XIV a fait aux protestants, nous sommes en train de le faire à ceux qui ont du bien au travers de l’impôt sur la fortune. Mais après tout, la France a toujours fait la même chose : se débarrasser des gens compétents qui font de l’ombre à la classe étatique. Cette République-là n’a besoin ni de savants, ni d’entrepreneurs.

Et ce que les incompétents qui nous gouvernent ont fait à l’ensemble des activités créatrices en France, je ne vois pas pourquoi ils ne le feraient pas à l’agriculture. Tout le monde sait que si un ministre socialiste était nommé responsable de la production de sable au Sahara, deux ans plus tard il faudrait en importer. Par exemple, l’Allemagne aujourd’hui a une balance commerciale de ses produits agricoles plus excédentaire que la nôtre. … et nos terres agricoles ne valent donc même pas le tiers de ce que valent les terres agricoles chez nos voisins. Je ne peux pas songer à une seule autre période de l’histoire de France et de l’Allemagne où une telle chose ait pu se produire.

La bonne nouvelle est cependant, comme l’avait dit Mrs Thatcher dans un débat contre le candidat socialiste, que « le socialisme ne dure que tant que les socialistes trouvent de l’argent à voler chez ceux qui ne le sont pas ». Ce qui rejoint Bastiat : « Dans le fonds, il n’y a que deux façons de se procurer les biens dont on a envie. Soit on travaille pour les acquérir, soit on les vole ». Le socialisme est partisan de la seconde solution, mais il y a de moins en moins d’argent à voler. Il touche donc à sa fin.

Charles Gave
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