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27/3/13 Thierry Desjardins
          On a des comptes à demander aux juges !

A-t-on le droit de dire, comme vient de le faire Henri Guaino, qu’un juge a « déshonoré la justice » ? Evidemment. Les juges qui ont condamné Dreyfus ont déshonoré la justice, les juges qui ont siégé à Riom pendant l’occupation ont déshonoré la justice, les juges de Bruay-en-Artois, de la Vologne ou d’Outreau ont déshonoré la justice, sans parler des juges francs-maçons de Nice et de bien d’autres.

C’est défendre l’honneur de la justice elle-même que de s’en prendre à des magistrats qui, par idéologie, ont oublié qu’ils devaient, en toute impartialité, rendre la justice « au nom du peuple français ».

Si leur indépendance est garantie, ils ne sont tout de même « que » des fonctionnaires de l’Etat et n’ont pas à se servir des pouvoirs exorbitants que la République leur a confiés pour tenter de changer notre société ou régler des comptes personnels.

Certes, il y a des juges honnêtes mais la justice française souffre depuis trop longtemps de « petits juges rouges » qui rêvent d’envoyer derrière les barreaux tous « les salauds de patrons » et de massacrer les bourgeois. Tout le monde sait que l’Ecole de la magistrature de Bordeaux est une ultime survivance de mai 68 et que la plupart des syndicats de magistrats sont des repaires de « gauchistes ». Il suffit d’ailleurs d’aller s’asseoir dans une salle d’audience pour s’apercevoir, bien vite, que le délinquant, pour peu qu’il soit issu d’un milieu défavorisé, a toutes les excuses et que sa victime, pour peu qu’elle porte une cravate, tous les torts.

Que le juge Gentil déteste Sarkozy est, naturellement, son droit le plus strict. Il n’est d’ailleurs pas le seul. Mais qu’il aille jusqu’à mettre l’ancien président de la République en examen pour avoir « abusé de la faiblesse » de Liliane Bettencourt est inadmissible car, bien sûr, cela ne tient pas debout. Les Bettencourt et quelques autres grosses fortunes du pays ont toujours aidé financièrement, en toute illégalité et de très bon cœur, la plupart des candidats à la présidence, de droite comme de gauche.

On dira que Nicolas Sarkozy est (peut-être) coupable d’avoir eu recours à des financements occultes pour sa campagne présidentielle et que, ces faits étant prescrits, le juge Gentil a cherché un autre motif pour le coincer. C’est, bien sûr, intolérable et ne peut conduire, du moins on veut l’espérer, qu’un à un non-lieu.

Henri Guaino avait-il alors le droit de déclarer que Gentil « déshonorait la justice française » ? Oui. On ne voit pas pourquoi, dans une démocratie, un juge pourrait tenter de déshonorer un citoyen, quel qu’il soit, en magouillant sur les motifs de mise en examen, sans qu’on ait le droit d’émettre des réserves sur son honnêteté et son sens de l’honneur.

Il est dommage que nous ayons totalement oublié la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen qui est, pourtant, le fondement même de notre droit. L’article 11 affirme : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de homme », l’article 15 précise : « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ». Guaino « demande compte » à Gentil de « son administration » et a parfaitement le droit de « communiquer son opinion ».

Mais dans notre pauvre et vieux pays qui prétend encore être celui de toutes les libertés, il y a bien longtemps que « les castes au pouvoir » ont oublié cette Déclaration des Droits de l’Homme et se croient tout permis. Il serait grand temps de leur rappeler que nous avons des comptes à leur demander.

Thierry Desjardins


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