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6/10/11 Faraj Chemsi
                    Lettre ouverte à Alain Juppé

Vous parlez Europe, respirez Europe, jurez Europe,                       alors appliquez ses règles !


Monsieur le Ministre,

Je vous interpelle suite à votre intervention télévisée sur France 2. Cette lettre pourrait aussi s’adresser à vos collègues, tous bords politiques confondus.

Vous avez parlé Europe, respiré Europe, juré Europe, affirmé Europe, transpiré Europe face aux diverses questions des intervenants. Vous avez affirmé que la seule issue, la seule solution à la crise actuelle prévue depuis belle lurette, c’est encore l’Europe et toujours l’Europe !

Comme la majorité des Français, je pense que la situation économique due essentiellement à l’endettement abyssal de l’Etat et à celui de son système de sécurité sociale ne pouvait être ignorée par des personnes comme vous, qui avez accédé aux plus hautes fonctions de la République française. La seule qualité demandée aux dirigeants politiques est d’être lucides et ainsi de parer aux possibles malheurs de leur peuple. Les dirigeants politiques qui se sont succédé ont donc failli à leur devoir.

A force de mettre des rustines par manque de courage politique, ou enivré par la conquête du pouvoir, vous tentez de mettre le peuple français devant le fait accompli et l’inviterez à se serrer la ceinture.

Au mois de juin prochain, il est prévu que la note AAA de la France soit dégradée et le pneu France éclatera !

Pourquoi rêvez-vous Europe et n’avez-vous pas, comme les dirigeants allemands, fait les réformes préventives et nécessaires, en appliquant tout simplement des directives européennes, celles que vous ou vos confrères ont proposées et signées.

Par exemple je me permets de vous rappeler l'article 57 de la directive 92/49/CEE, définitivement transposée dans le droit français, où il est indiqué :

" Les Etats membres adoptent au plus tard le 31 décembre 1993 les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive et les mettent en vigueur au plus tard le 1er juillet 1994."

La France devait donc, à partir du 1er juillet 1994, mettre en concurrence les caisses de sécurité sociale.

De l’autre côté du Rhin, en Allemagne, les caisses publiques sont en concurrence depuis 1996.

Pourquoi cette date de janvier 1996 ?

La lecture de la directive européenne 92/49/CEE fournit la réponse. A l'article 47 il est indiqué :

" La République fédérale d'Allemagne peut reporter jusqu'au 1er janvier 1996 l'application de l'article 54 paragraphe 2 deuxième alinéa première phrase.''

C'est donc en application de cette directive ''qu'en Allemagne les caisses publiques d'assurance maladie sont en concurrence depuis janvier 1996'', comme l'a déclaré M. Jean-François Mattei (Journal Officiel de la République Française rapportant la séance du 27 octobre 1998 de l'Assemblée nationale.).

Comment se fait-il dès lors qu'un texte européen soit applicable en Allemagne et non en France, comment se fait-il que les gouvernements français successifs continuent d’affirmer que les directives européennes ne sont pas applicables à la Sécurité sociale et donc de mentir ? Où sont la primauté du droit européen et la libre circulation des biens et des personnes ?

Vous ne pouvez, vous qui jurez Europe, ignorer ce dysfonctionnement, cette non-application du droit, ce déni de justice qui est une cause majeure du désastre économique français, sinon comment expliquez-vous que même les socialistes n’imaginent comme unique solution qu’une dispense de charges sociales pour que les PME et PMI embauchant des jeunes et des vieux ?

Surtout ne niez pas la fin du monopole de la sécurité sociale française comme vos collègues en me fournissant une réponse-type que vous trouverez au portail mensonger de la sécurité sociale, et ne bottez pas en touche en confiant la réponse a un service annexe.

Je vous suggère plutôt de regarder de plus près ce portail qui, tout mensonger qu’il soit, a dû laisser filtrer une vérité bien gênante pour sa thèse. Vous constaterez que la page Internet des caisses nationales de sécurité sociale indique que « les institutions de retraite complémentaire régies par le titre II du même livre qui mettent en œuvre la retraite complémentaire obligatoire en répartition des travailleurs salariés et assurent une solidarité nationale interprofessionnelle (ARRCO et ARGIRC, articles L 921-1 et suivant du code de la sécurité sociale) relèvent elles de l’organisation de la sécurité sociale ». Or l’article L 921-1 trouve son origine dans la loi n° 94-678 du 8 août 1994 relative à la protection sociale complémentaire des salariés et portant transposition des directives n° 92-49 et n° 92-96 des 18 juin et 10 novembre 1992 du Conseil des communautés européennes.

Vous aurez ainsi remarqué que l’ARRCO et l’AGIRC, régimes de sécurité sociale à part entière, sont bel et bien visés par les directives européennes.

Il en découle nécessairement que tous les régimes de la Sécurité sociale le sont aussi et qu’aucun d’entre eux n’a plus le moindre monopole.

Il ne vous reste plus qu’à annoncer la liberté de la protection sociale, signée par vos homologues socialistes en 1992, la liberté de choix, freedom of choice, que vous avez défendue canon à la main en Libye, principe fondamental de toute République, si française soit-elle.

En vous remerciant par avance de votre prochaine réponse confirmant bien la liberté de la protection sociale, je vous prie, Monsieur le Ministre, d’agréer l’expression de mes salutations distinguées.

Dr Faraj CHEMSI

Déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen

Art 32 : Le droit de présenter des pétitions aux dépositaires de l’autorité publique ne peut, en aucun cas, être interdit, suspendu ni limité.
Art 33 : La résistance à l’oppression est la conséquence des autres droits de l’homme.
Art 34 : Il y a oppression contre le corps social, lorsqu’un seul de ses membres est opprimé. Il y a oppression contre chaque membre lorsque le corps social est opprimé.
Art35 : Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.
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